Fantômas, le fantôme des vivants
Le 20ème siècle est une invention de Fantômas[1]
Fantômas qui êtes aux cieux, sauvez la poésie ![2]
Fantômas, c’est du Nietzsche pour les boniches[3]
Fantômas est le fantôme des vivants. Comme Bergson le 28 mai 1913, se penche sur les fantômes et conclue que si les fantômes existent, ils sont plus vivants que morts
« L’histoire (…) ne se recommence pas ; la bataille d’Austerlitz s’est livrée une fois et ne se livrera jamais plus (et le corbeau dit : jamais plus, Nervermore, ajoute le poète) (…) Au contraire une hallucination véridique par exemple – l’apparition d’un malade ou d’un mourant à un parent ou à un ami qui demeure très loin, peut-être aux antipodes – est un fait qui, s’il est réel, manifeste sans doute une loi analogue aux lois physiques, chimiques, biologiques… »
Fantômas est aussi une hallucination véridique, il est une fiction écrite à toute vitesse par deux auteurs en quête d’argent et de célébrité – et poussés par leur éditeur … - mais il est aussi un mythe qui est écrit par une société qui se rêve éveillée, qui rêve son époque en même temps qu’elle la vit : la bande à Bonnot, le Titanic, la grande guerre et bien d’autres faits horriblement réels sont des exploits de Fantômas, à peine transposés dans les romans, certains anticipés, d’autres revécus, comme le rêve est à la fois chronique du passé et anticipation de l’avenir…
[1] Alexandre Vialatte, Chroniques de la Montagne, (1950-60), Robert Laffont, 2000 Coll. Bouquins 2 vol.
[3] Max Jacob, « Écrit pour la Société des Amis de Fantômas », Les soirées de Paris, n°26-27, juillet-août 1914.
[4] « Fantômes de vivants » et « recherche psychique » est le titre d’une conférence de Bergson, prononcée à la Society for Psychical Research de Londres le 28 mai 1913, les citations ci-dessous sont extraites de cette conférence.
(Henri Bergson, Le rêve suivi de Fantômes de vivants, édition critique dirigée par Frédéric Worms, Puf, Quadridge, 2013.